Dans notre précédent article intitulé La contestation du bénéficiaire, nous avons discuté de l’affaire Calmusky c. Calmusky, entendue en 2020 par la Cour supérieure de l’Ontario. L’une des grandes questions en litige dans cette affaire concernait la désignation de Gary Calmusky comme bénéficiaire du fonds enregistré de revenu de retraite (FERR) de son défunt père. L’autre fils d’âge adulte du défunt, Randy, a plaidé que ces fonds n’auraient pas dû être transmis directement à Gary, provoquant tout un remous. Randy a porté l’affaire devant les tribunaux, pour que le FERR soit détenu en fiducie au profit des ayants droit de son père. Il a également exigé qu’un compte bancaire précédemment détenu conjointement par Gary et le défunt soit également détenu en fiducie au profit des ayants droit.
La Cour a alors statué qu’un compte bancaire conjoint devait être détenu en fiducie au profit des ayants droit lorsqu’il résultait du transfert à titre gratuit d’un actif à un enfant d’âge adulte, à moins que cet enfant ne puisse prouver que le défunt avait l’intention de lui faire don directement de cet actif. Ce jugement était conforme à la jurisprudence établie. Toutefois, la Cour a ensuite appliqué ce même principe à la désignation de bénéficiaire du FERR, sans égard au droit déjà en vigueur régissant ces désignations! Ce faisant, la Cour a instauré un doute à l’égard des désignations courantes, que ce soit pour les régimes enregistrés ou pour les assurances, et on se demande maintenant si elles seront soumises à un contrôle judiciaire approfondi et feront l’objet de litiges.
L’affaire Calmusky c. Calmusky a été fortement critiquée dans les milieux juridiques et financiers. Par la suite, en 2021, dans l’affaire Mak (Estate) c. Mak, un autre juge du même tribunal est parvenu à une conclusion opposée à celle du juge de l’affaire Calmusky c. Calmusky. Dans l’affaire Mak (Estate) c. Mak, en examinant la désignation de bénéficiaire d’un FERR d’un enfant d’âge adulte, le tribunal a indiqué qu’il y avait « de bonnes raisons de douter de la conclusion selon laquelle la doctrine de la “fiducie résultoire” s’applique à la désignation de bénéficiaires » [traduction]. Les commentaires du juge laissent entendre qu’il n’est pas nécessaire de déterminer l’intention d’une personne qui désigne un bénéficiaire en s’appuyant sur la législation, par exemple celle qui régit les régimes enregistrés et les assurances.
La décision dans l’affaire Mak (Estate) c. Mak est la bienvenue, mais elle n’élimine pas complètement le doute créé par l’affaire Calmusky c. Calmusky. En effet, il s’agit de deux décisions du même tribunal, et l’une ne prévaut pas contre l’autre. En fait, cette question ne sera pas réglée sans décision de la Cour d’appel ou changement de la loi. Il faut également se rappeler que ces affaires sont fondées sur le droit ontarien, et que le principe de la fiducie résultoire dont il est question dans ces affaires peut être appliqué de différentes manières dans différentes provinces (et qu’il est inapplicable au Québec).
Étant donné le climat d’incertitude qui entoure actuellement ce point, il est plus important que jamais de vous assurer que les souhaits de vos clients concernant leurs bénéficiaires désignés sont consignés de façon exhaustive. Cela réduira considérablement les risques de contestations juridiques ultérieures.
PPI a créé un exemple de libellé à utiliser pour consigner les intentions d’un titulaire de police relativement à la désignation de l’un ou de plusieurs de ses enfants d’âge adulte comme bénéficiaires. Consultez le modèle de document de consignation des intentions de désignation de bénéficiaire sur le site Web des conseillers de PPI (connexion requise).
Pour obtenir plus de renseignements sur les affaires Calmusky c. Calmusky, Mak (Estate) c. Mak et la contestation de la désignation du bénéficiaire, communiquez avec votre bureau régional de PPI.